Chaque année, au début de l’automne, la ville de Suwon accueille le Festival culturel de Hwaseong. Les environs de la forteresse, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, sont le théâtre de trois jours pleins de spectacles et de réjouissances, en l’honneur du roi Jeongjo, qui l’érigea entre 1794 et 1796.
C’est une grande fête que je rêvais de découvrir, et en 2017, j’ai séjourné trois jours à Suwon. Il y avait tant d’activités que je n’ai pas pu tout voir. Et comme j’en ai aussi profité pour faire le tour de la forteresse Hwaseong et de ses remparts, j’ai manqué quelques moments importants. Mais j’ai passé des journées très agréables, à me promener dans le centre historique et à assister à de nombreuses performances.
La forteresse de Hwaseong en quelques mots
La forteresse a été construite par le roi Jeongjo, en hommage à son père, le prince héritier Sado. On sait de ce dernier qu’il souffrait de problèmes psychiques, en raison notamment d’une santé défaillante et des fréquentes humiliations de son père, le roi Yeongjo. Leurs relations étaient si tendues, que le roi fit exécuter son fils de la plus atroce des manières, en l’enfermant dans un coffre pendant huit jours et en le laissant mourir de faim. Cette terrible histoire est racontée par la propre épouse du prince Sado, Dame Hyegyeong, dans ses mémoires rédigées entre 1795 et 1805. Elle a fait l’objet également d’un film en 2015.
Sado avait un fils, Jeongjo, qui lui était très attaché. Il s’est rendu plus de douze fois sur sa tombe, non loin de Suwon. Et quand il venait, il séjournait dans le palais temporaire, Hwaseong Haenggung.
Entre 1794 et 1796, il fit ériger les remparts extérieurs. Et en 1795, il organisa une gigantesque célébration pour les vingt ans de son règne, ainsi que le soixantième anniversaire de sa mère. Symboles de son affection filiale, tous ses différents pèlerinages ont été l’occasion des plus grandes processions royales de la dynastie Joseon. Et c’est précisément ces processions qui font l’objet d’une reconstitution à Suwon, chaque année, au début de l’automne.
Les différents temps du festival culturel de Hwaseong
C’est en janvier 1963 que la forteresse de Suwon a été désignée « Site historique n°3 » par les autorités coréennes. On imagine bien que les festivités d’aujourd’hui n’ont plus grand-chose à voir avec celles d’hier. Le festival a pris de l’ampleur au fil du temps. Tout le centre historique est comme une grande salle de représentation en plein air, et les habitants de la ville sont largement mis à contribution.
Si je devais comparer à quelque chose que je connais, je dirais que cela me fait penser aux Médiévales de Provins. En mode plus « dilué » peut-être, car la forteresse de Suwon est immense. À Provins, il est presque impossible d’avancer dans les allées, tant il y a de monde. La moindre bousculade, et c’est la catastrophe assurée. Ce n’est pas le cas ici. Est-ce parce qu’il y a plus de place, ou parce qu’il y a moins de monde ? Je ne saurais dire. Mais même pendant les représentations les plus courues, j’ai toujours eu le sentiment de pouvoir respirer. Je le dis, parce que je ne suis sûrement pas la seule à être un peu agoraphobe.
La cloche de Yeomingak (jeudi soir)
Le festival dure trois jours, du vendredi au dimanche. Mais en réalité, il commence dès le jeudi soir, à 19h30, avec une cérémonie d’une demi-heure qui consiste à faire sonner la cloche pour marquer le début des festivités. Elle a lieu au niveau du beffroi Yeomingak, juste en face du palais Hwaseong Haenggung.
Cette courte cérémonie est suivie d’une performance musicale d’une heure, Nakseongyeong, qui célèbre l’achèvement de la forteresse. Elle se tient dans Bongsudang, le bâtiment principal du palais. C’est ici qu’a eu lieu le 60e anniversaire de la mère du roi Jeongjo en 1795.
La cérémonie d’ouverture (vendredi soir)
Le vendredi soir, de 20h00 à 21h30, il y a une grande fête sur la grand-place devant le palais. Je suis arrivée à Suwon le vendredi pour pouvoir y assister, car le programme indiquait « chants, danses, musiques et plaisir » (« partage du plaisir du roi avec le peuple »).
Mais je n’avais pas compris qu’il fallait être muni de billets, et je n’ai pas pu accéder aux gradins. Encore fallait-il le savoir ! Ce n’est indiqué nulle part dans les dépliants, ni au centre d’information touristique. Je ne vous cache pas ma frustration, car même si la ville avait prévu des chaises et des écrans géants devant les grandes bâches qui entouraient les gradins, j’aurais préféré voir le spectacle « en vrai », d’autant que certaines représentations traditionnelles avaient l’air magnifique.
Je ne suis donc pas restée très longtemps assise, et j’ai décidé de visiter le palais Hwaseong Haenggung de nuit, puisqu’il était joliment illuminé.
Après être redescendue, je me suis dirigée vers le grand parking à droite du palais. Quelle ne fut pas ma surprise en voyant que cet espace servait d’immense lieu de restauration ! Donc si vous avez une petite faim, sachez que tout est prévu pour que ne pas mourir d’inanition.
Je me suis baladée avant de rentrer pour la nuit.
La reconstitution de la parade du tombeau du roi Jeongjo (samedi et dimanche)
C’est l’un des moments les plus importants du festival, celui que j’ai plus ou moins manqué. Il faut dire que ce n’était pas si facile de comprendre le programme de ces trois jours. Dans la brochure en anglais récupérée au bureau touristique, il y avait tellement d’informations que je ne savais plus où donner de la tête. Je me suis focalisée sur les représentations qui étaient précédées d’une étoile, parce que c’était clairement les « immanquables ». Or, si la parade est bien mentionnée, rien n’indiquait qu’il s’agissait d’un événement d’importance…
Bref, la parade du tombeau du roi Jeongjo dure deux jours, le samedi et le dimanche. Et ce qui est très intéressant, c’est qu’elle est divisée en trois sections : Séoul, Anyang/Uiwang/Suwon, et Hwaseong. Cela signifie que si vous êtes à Séoul le samedi, vous pouvez la voir également, puisqu’elle fait le trajet suivant, entre 10h00 et 18h00 : palais Changdeokgung, porte Sungnyemun (ou Namdaemun), Seoul Station Plaza, Baedari, île artificielle Nodeul, Nodeul Pier Park, puis palais temporaire Siheung Haenggung. Pour les deux autres sections, vous trouverez toutes les informations sur le site http://www.swcf.or.kr/english/?p=65
La reconstitution du soixantième anniversaire de la reine mère (samedi matin)
Cette reconstitution a lieu le samedi matin, de 10h30 à 12h00, dans la bâtiment principal du palais, Bongsudang. Les places assises sont limitées, il faut venir tôt.
Performances artistiques (tous les jours)
Tout au long des deux journées de samedi et dimanche, et dans toute la ville, il y a de nombreuses performances artistiques et culturelles. J’ai vraiment apprécié la diversité de ce qui est proposé, car il y en a pour tous les goûts : on peut écouter des musiques traditionnelles (gayageum, samulnori), apprécier des spectacles de danse, écouter des chansons à la lumière des lanternes de papier, voir la danse du lion, expérimenter la médecine coréenne traditionnelle, etc.
Mon conseil : entre deux « moments » importants, explorez la vieille ville, et arrêtez-vous quand bon vous semble, cinq minutes, plus si vous le voulez, juste pour voir et écouter les artistes du rue.
Spectacle d’archerie (tous les jours)
Les archers coréens dominent la scène sportive internationale. Ils raflent en général toutes les médailles pendant les Jeux olympiques. L’usage militaire des arcs et des flèches en Corée remonte au 5e siècle avant notre ère. Et il a perduré jusqu’au 16e siècle ! Pas étonnant que l’un des moments forts du festival de Suwon soit la représentation donnée par les archers professionnels.
Il faut savoir que la conception des arcs est telle que les tirs sont particulièrement longs et puissants. À cheval, c’est encore plus impressionnant. Ne manquez pas ce spectacle plein de suspense et d’humour, qui se tient devient Yeonmudae, l’ancien poste de commandement à l’est de la ville. Je me suis beaucoup amusée.
J’ai continué la visite par l’espace consacré aux techniques de construction traditionnelles.
Le clou du spectacle : la cérémonie de clôture (dimanche soir)
Le plus beau moment selon moi. J’ai toujours dit que j’adorais le sens du spectacle des Coréens, et j’avoue qu’ils m’ont bluffé. En fait, je ne m’attendais pas à un son et lumière d’une telle envergure. Il y a sûrement d’aussi beaux spectacles ailleurs dans le monde. Mais c’était vraiment très réussi, très festif, surtout à la fin, quand spectateurs et acteurs se mêlent joyeusement sur la petite colline devant la porte Changnyongmun.
Le spectacle final est gratuit et ouvert à tous. Il dure une heure et demie, de 20h00 à 21h30. Je suis arrivée une heure avant, la foule était déjà immense. J’ai pu trouver une place pas trop éloignée de la scène, mais j’étais assise par terre et ce n’est pas très confortable. Je vous conseillerais d’arriver bien avant, je pense que toutes les places assises ne sont pas uniquement réservées aux porteurs de billets.
En repartant vers mon hôtel, j’ai pu profiter des éclairages de nuit sur les remparts de la forteresse de Suwon, ainsi que de ceux qui magnifiaient la petite rivière centrale, Suwoncheon.
Trois jours de festival, c’est tellement dense que je ne peux pas tout retranscrire ici. Mais j’espère vous avoir donné quelques pistes et que vous penserez à inclure cette visite dans votre parcours, si vous venez en Corée du Sud au début de l’automne.
Pour vous rendre à Suwon :
En coréen : 수원화성문화제
Venir à Suwon depuis Séoul : ligne 1 du métro ou ligne Bundang. À la station « Suwon », prendre la sortie n°4. Un arrêt de bus se trouve juste devant l’hôtel Novotel Ambassador. Les lignes n°11 et 13 desservent l’arrêt Hwaseong Haenggung Palace.
Si vous ne deviez rester qu’un jour : le dimanche, sans hésiter. La plupart des activités ont lieu le samedi ou le dimanche, mais la présence d’un plus grand nombre de visiteurs rend la visite plus festive. La cérémonie de clôture est à ne manquer sous aucun prétexte (elle ne finit pas tard, vous pouvez facilement rentrer à Séoul en métro, comptez une heure).
Site Internet : http://www.swcf.or.kr/english/