Pourquoi la Corée ? C’est une question que je me pose souvent à moi-même, pas vous ? K-food, k-drama, k-pop, comment ces quelques mots encore récents dans le vocabulaire ont-ils pu changer la vie de milliers de personnes en l’espace de quelques années seulement, c’est une vraie interrogation à laquelle la journaliste Ophélie Surcouf tente d’apporter une réponse dans un ouvrage à paraître aux éditions l’Atelier des cahiers ce 21 octobre 2021.
En allant à la rencontre d’hommes et de femmes, Ophélie Surcouf s’interroge sur l’impact de la culture coréenne dans le monde. Et commence sa quête par une interrogation somme toute légitime. Pourquoi faut-il se demander : pourquoi la Corée, pourquoi BTS, pourquoi le kimchi ? La journaliste écrit : « On ne demande plus trop en France : pourquoi le Japon ? On ne demanderait jamais à qui que ce soit : « Pourquoi les États-Unis ? Pourquoi New‑York ? » Est‑ce une forme de dédain ? L’ignorance face à une culture perçue comme inférieure – dont on ne comprend pas qu’on puisse la préférer à la nôtre ? ». Du dédain, je ne sais pas et je ne veux pas le croire, mais de la curiosité, oui, cela va sans dire. Les ascensions fulgurantes ne laissent jamais indifférents.
La culture populaire coréenne (k-drama, manhwa, webtoon, k-pop, sans oublier le cinéma) s’est si rapidement développée, qu’on est en droit de se demander comment et pourquoi la « coréanité » fait son chemin dans les mœurs occidentales. Pour comprendre, la jeune journaliste a discuté pendant trois ans avec un patchwork de personnalités très différentes, quatorze au total : une chercheuse sud-coréenne ; un universitaire français aux multiples vies (aka Benjamin Joineau) ; une adoptée coréenne ayant grandi aux Etats-Unis ; des Français compétiteurs en e-sport ; une blogueuse ; une directrice de centre culturel née d’un père coréen et d’une mère russe ; un réalisateur coréen dont les parents ont émigré à LA dans sa jeunesse ; une fangirl chilienne ; la youtubeuse française Nunaya ; une américaine, doctorante en sociologie, et en Français, doctorant en Études coréennes aux USA ; pasteure épiscopalienne fan de BTS ; une actrice allemande ; sans compter la journaliste, elle-même, qui s’est prêtée au jeu des confidences.
Les motivations des interviewés sont aussi nombreuses que la diversité de leurs parcours. La journaliste évoque leurs rencontres, qui sont à la fois des moments d’échanges personnels, mais aussi l’occasion d’interroger les évolutions de la culture populaire sud-coréenne depuis les années 80.
L’ouvrage se concentre sur la société du divertissement : industrie cinématographique ou musicale, fandoms, productions télévisuelles. On pourrait penser, à tort, que la Corée du Sud ne se résume qu’à elle. Certes, c’est la partie la plus visible de l’iceberg, celle sur laquelle repose tout le soft power sud-coréen. Mais je pense qu’en agissant ainsi, le gouvernement coréen met de côté les autres « fans », moins visibles ceux-là, moins bruyants aussi, ceux qui s’intéressent à l’histoire, au sport, à l’architecture, à la nature… Je le regrette chaque jour davantage, et je me sens de plus en plus en décalage dans mon propre rapport à la Corée. Pas vous ?
Pour Ophélie Surcouf, l’émergence du phénomène culturel qu’est la hallyu, la vague coréenne, s’explique simplement par les gens qui la font. Certains évoquent leur fascination pour ce pays. Beaucoup expliquent leur enthousiasme, voire leur excitation, à faire partie d’une communauté. Pour ces personnes-là, on comprend qu’il s’agit essentiellement d’une quête identitaire. Rares sont ceux qui, à l’exemple de la Youtubeuse Nunaya, disent avoir vécu une expérience difficile. Plus inquiétant est le discours de cette religieuse qui parle des BTS comme d’une épiphanie… Effervescence collective, extase… Des mots forts, censés guider vers le bonheur. Nul doute que dans une société post-covid en manque de repères, le monde du divertissement coréen a encore de beaux jours devant lui !
Pourquoi la Corée ? La vague coréenne et nous.
Ophélie Surcouf
L’Atelier des Cahiers, 2021
ISBN : 979-10-91555-70-8
199 pages
21 EUR